[TERMINE] Promenade illégale [pv Noob]

Les rues de Los Angeles, ensoleillées et propres étaient bondées de monde en ce samedi après midi. Les enseignes étant ouvertes, nombreuses étaient les personnes à faire les boutiques, accompagnées d'enfants braillards. La haute tour qu'était le QG de Dorian, le dictateur qui dirigeait la quasi-totalité du monde, surplombait la ville mais si les gens frissonnaient en la voyant, elle n'assombrissait pas de son ombre l'allée marchande.

Des personnes habitaient et travaillaient dans cette tour. Mais rares étaient les habitants de Los Angeles qui pouvaient mettre des noms sur des visages car rares étaient les gens qui connaissaient, même de vue, des personnes travaillant là-bas. Certes, les hauts membres de l'Etat était trop connu pour leurs multiples apparitions publiques, et beaucup connaissaient les Partisans qui ratissaient la ville, le soir, espérant surprendre des Rebelles, mais ce n'était pas la totalité des Partisans qui avaient fait de la sécurité de l' Etat leur but et leur vie. Qui était réellement votre voisin ? Etiez vous sûr que le gentil monsieur qui avait ramassé le journal que vous aviez fait tombé ne venait pas d'assassiné de sang froid une famille et des enfants soupçonnés de comploter contre Dorian. En bref, le climat, chargé de terreur, pesait sur les consciences des plus grands qui préféraient oublier en achetant plus que raison un samedi après midi.

Un jeune garçon avec des lunettes noires, sortit d'une librairie, un roman sous le bras. Son tee-shirt dévoilait des bras musclés et sa carrure ne laissait aucun doute sur sa puissance.
Léandre redressa ses lunettes de soleil et observa avec attention la rue. En tant qu' Agent Opérationnel en attente de lancement d'une mission, jolie expression pour dire qu'il était un assassin qui attendait un contrat, il n'était pas sensé sortir de la Tour, dans laquelle il vivait depuis près de deux ans. A plus de dix-neuf ans, il avait reçu son pouvoir comme tous les jeunes de son âge. Mais contrairement à d'autres qui étudiaient le droit, la médecine ou encore la sculpture, lui étudiait l'art de tuer, discrètement. Un pistolet ne quittait pas son côté et autour de son coup se trouvait, accroché à une chaîne en argent, une petite plaquette du même métal sur laquelle étaient gravés son nom, son prénom, son âge et un numéro de téléphone. Pour le reconnaître s'il mourrait lors d'une mission.

Le garçon se décida à sortir au soleil lorsqu'il eut vérifé qu'il ne connaissait aucun visage. SI la Tour apprenait qu'il était sorti... il courrait droit à la mission suicide. Mais il en avait assez d'être enfermé et voulait regouter aux joies que procurait un courant d'air autre que conditionné rafraîchissant son visage.

D'un pas sûr et connaisseur, bien qu'il ne se repera qu'aux panneaux et grâce à sa mémoire, il se dirigea vers un parc. Son sac, noir, contenait d'autres achats tels qu'un livre sur les différentes utilisations du métal et un traité sur la résistance physique à la torture.

Le soleil aveugla un instant Léandre malgré ses lunettes foncées et il ne vit pas la personne qui marchait rapidement en sa direction. Et s'il ne la vit pas, il ne pu l'éviter. Avant qu'il n'ait pu dire Dorian, il se retrouva à terre, ses lunettes un peu plus loin, avec une personne sur le ventre.

Nob’ rasait les murs. Si elle croisait Tobias là, maintenant tout de suite, il allait lui interdire de sortir. Mais Nobody ne pouvait décemment pas rester enfermée dans ces souterrains toute sa vie! Bon, certes, elle était sortie la veille, avait manqué de se faire décapiter, puis s’était fait suivre par deux Partisans qui l’avaient poursuivies jusque dans les tunnels, jusqu’à ce qu’enfin, elle parvienne à devenir invisible, à se glisser derrière eux et à leur planter un poignard entre les côtes. Et Tobias l’avait sévèrement réprimandée. Et si jamais elle n’avait pas réussi? Ils auraient trouvé la base secrète. Et tout le monde serait mort. Et ce serait sa faute à elle. Et bla bla bla et bla bla bla. Il y en avait eu pour des heures. Mais Nobody était impulsive, avait besoin de liberté, une liberté qui lui était refusée, aussi, elle devait sortir, et maintenant.
Lorsqu’elle vit néanmoins l’ombre de Tobias, elle devint aussitôt invisible. Ce qu’il y avait de bien avec son pouvoir, c’était qu’elle devenait également immatérielle. Comme si elle n’existait plus. Alors, pour aller plus vite, elle traversa la roche. Tout simplement. Et se retrouva à l’air libre.

Il faisait bon. Nob’ put se débarrasser de son pull. Elle jeta un œil à ses habits. Sa sœur n’approuvait pas du tout son style. En réalité, la jeune femme prenait ce qui lui passait sous la main. Ce qui faisait que, ce jour-là, elle portait une tunique bleue ciel et un short noir. Edelweiss, sa sœur aînée, détestait particulièrement qu’elle soit habillée de cette manière, mais Nobody n’en avait cure. Elle faisait ce qu’elle voulait.
Et elle voulait sortir. Et s’envoler. Sur le coup, elle aimerait bien voler au dessus de la ville. Pour croiser Dorian dans les airs, tiens. Et le tuer. Oh, c’est joli d’avoir des rêves. Après tout, l’espoir fait vivre.
Mais Nobody se rendait invisible, pour le meilleur et pour le pire, et cela s’avérait bien pratique.

Chacon se rendit tout naturellement dans le centre de Los Angeles. Là où l’agitation, provoquée par des Partisans pas forcément actifs (il y avait ceux qui travaillaient pour Dorian, et ceux qui le soutenaient en silence), était un régal. Même si elle était en territoire ennemi, ici, personne ne connaissait son visage, mis dans l’ombre par une casquette aux couleurs des Chicago Bulls.
Un léger sourire aux lèvres, fermant les yeux, Nobody marcha parmi les autres personnes, sans autre souci en tête que cet air frais qui lui fouettait le visage et…
Aïe.
Quelqu’un la percuta plus ou moins violemment, et, emportée dans la chute, Nob’ se retrouva quasiment sur cette personne. Aussitôt, elle roula sur le côté et se redressa dans une grimace. Son coude avait heurté le bitume, et un bleu commençait déjà à fleurir. Sa peau marquait très facilement. Elle ramassa les lunettes du jeune homme qui lui était entré dedans de plein fouet, et les lui tendit avec une main secourable pour l’aider à se relever.

- Désolée. Je ne faisais pas attention.

En réalité, elle était aussi fautive que lui. Elle avait les yeux fermés, et lui ne devait pas regarder où il allait.

Léandre eut le réflexe acqui lors des cours d'art martiaux: se relever dès que possible. Aussi à peine la jeune fille était debout, qu'il se remit sur ses jambes. Son regard évita celui de la jeune fille jusqu'à qu'il ait remis ses lunettes noires. Les yeux sont trop reconnaissables, il valait mieux pour un assassin que l'on ne le reconnaisse pas. Non sans un vague merci qui sonnait faux aux oreilles de Léandre, il ramassa son sac et son livre. Heureusement que le maître mot de sa sortie était discrétion, tout le monde les avait regardé. D'un mouvement de main calculé, Léandre ébouriffa ses cheveux. C'était sa manière à lui de se remettre d'aplomb autant physiquement que mentalement. M'enfin.

Derrière ses verres teintés, il observa la jeune fille qui se tenait le bras. Petite, à peu près son âge. Sa casquette et ses habits la désignaient comme une adolescente normale, sans aucun rapport avec les Rebelles et léandre s'en vit soulagé. Parce qu'il n'aurait pas aimé la tuer.
Tuer.
Le mot fit grandir, comme par réflexe la tache argentée qui se trouvait, toujours plus grande, au centre des mains de Léandre qui plissa les yeux de douleur. Merlin mais pourquoi devait il être le seul clampin à avoir un don douloureux ? Non pas qu'il était encore sensible à al douleur, loin de là, mais parce que s'était agaçant.

Voyant que l'autre attendait quelque chose, il se demanda ce qu'il devait répondre; Il ne pouvait pas s'excuser aussi familèrement qu'elle venait de le faire, il n'était pas en tort. Aussi se résigna il à dire, d'une voix plate, sans ton particulier:

Merci pour les lunettes. Je... je n'aime pas les perdre.

Mon Dieu mais que c'était pathétique !! Il n'aurait pas trouvé plus nul s'il avait cherché à faire du pitoyable. Il détestait paraître stupide puisqu'il ne l'était pas. De sa main droite dans laquelle apparaissait encore une goutte d'argent, il se massa la nuque. Géné. Il était gêné. D'une voix quelque peu tremblotante qu' il contenu vite par un ton glacial, il continua:

Tu t'es fait mal ?

Non. Il était définitivement pitoyable à cet instant. Pourquoi choisir une voix froide si c'était pour exprimer de la compassion ?

Nobody fut étonnée de la dextérité du jeune homme, mais ne pipa mot. Il la remercia pour les lunettes, et elle hocha vaguement la tête. Une mèche s’échappa de sa queue de cheval et vint se loger devant ses yeux, en masquant le clair éclat. Les quelques passants qui les avaient fixés finirent par se relever, et se détourner.
Des lunettes de soleil. Idéal pour cacher une petite partie du visage. Nob’ l’inscrivit mentalement sur sa liste de choses à acheter. Elle allait se détourner et partir, mais le jeune homme lui demanda d’une voix glaciale si elle s’était fait mal. Elle haussa les sourcils. Quel ton étrange pour s’adresser à quelqu’un. La jeune femme haussa les épaules.

- Non. Pas plus que toi j’imagine.

Elle sentait le petit poignard masqué dans sa botte droite contre sa chair, et se doutait qu’avec l’impact elle s’était sans doute entaillée. Mais cela n’avait aucune importance. Elle se serait cassée le bras, encore… Nob’ frotta juste pensivement son tout nouveau bleu. dans cinq jours, il n’y paraîtrait plus rien.
Le regard de la Résistante se fixa soudain sur une tâche argentée au creux de la main de son interlocuteur. Elle fronça les sourcils.

- Mais toi tu t’es fait un truc.

Elle désigna nonchalamment la tâche. Avant de plisser les yeux. On aurait dit… qu’elle faisait partie de son anatomie. Ce qui était pour le moins étrange. Mais remarque, qu’est-ce qui n’était pas étrange ici… d’un point de vue objectif. il suffisait de se tourner, et on pouvait voir un homme au milieu d’une fontaine, tendant les bras, et créant lui-même des volutes d’eau. Ou alors cette femme, au loin, qui faisaient s’ouvrir les portes avant même d’y entrer. Tout cela était parfaitement normal, c’était le quotidien de chacun. Il paraissait que, cinquante ans plus tôt, les gens n’avaient pas de pouvoirs à dix-neuf ans… qu’ils étaient des enfants toute leur vie! Ça, c’était étrange.

Léandre eut un rictus lorsqu'elle remarqua gentiment qu'il avait quelque chose. Un truc ? Ca ? Mais c'était le "truc" le plus génial qu'il avait sur lui songea t il. Rapidement, il referma le poing, anxieux qu'elle connaisse autant de lui. Certes nombreux étaient ceux qui ne cachaient pas leur Pouvoir. Mais lui, il ne devait même pas exister. Alors que quelqu'un l'ait vu, et que cette même personne en sache autant sur ce qu'il était... voilà qui était déplorable.

Agacé, anxieux, Léandre regarda l'heure à sa montre: il lui restait deux heures avant que son supérieur qui le contrôlait ne revienne de vacances. Deux heures à ne pas dépasser. Certes le timing était large, la Tour n'étant qu'à dix minutes, mais pour Léandre avec lequel la ponctualité faisait deux, il fallait prévoir encore plus de temps. En fait, Léandre ajoutait ou retranchait systématiquement dix minutes aux horaires qu'on lui indiquait pour être sûr de n'avoir que vingt minutes de retard dans le pire des cas. Mais la n'était pas le sujet de conversation.

Léandre mit ses mains dans ses poches, ne sachant pas quoi faire de ses bras. Zut alors, lui qui était toujours sur de lui se dandinait bêtement devant une fille qui avait sûrement mieux à faire que le regarder. Ne voulant pas paraître plus stupide, Léandre voulut tendre la main droite dans le but de se présenter, mais ne sachant quoi dire, il préféra s'en abstenir. Salut moi c'est Léandre Prince, je vais peut être devoir te tuer demain mais bon... ah oui ! Je suis un Partisan fervent.

Non. Cette entrée en matière n'était pas la meilleure. Mais comment pouvait il savoir comment aborder une fille alors que les seules qu'il avait cotoyé jusque là pouvaient lui faire cracher ses poumons ou le transformer en glaçon d'un claquement de doigt. Flippant.
Aussi Léandre se contenta d'un léger et plutôt faible, sourire, une mèche lui tombant devant les yeux.

Nobody haussa les sourcils d’un air amusé. Il ne s’en allait pas, ne semblait pas spécialement vouloir rester, fixait sa montre, avait les mains dans ses poches. Nerveux? Elle sourit. Peut-être était-il lui aussi cloitré quelque part, et la nervosité était de mise lorsqu’on sortait depuis longtemps. Surtout avec les temps qui couraient. D’ailleurs, peu de gens devaient être désarmés. Elle-même avait un poignard dans sa botte, et une lame sans manche dans la poche arrière de son jean. Et ici, elle était en territoire ennemi. Oh… Nob’ se doutait bien qu’elle n’était pas tombé sur le seul Résistant qu’il pouvait y avoir dans ce quartier. Ici, tout le monde était Partisans, ou tout le monde était mort. Alors aujourd’hui, si elle voulait une journée plus ou moins normale, elle devait… jouer la comédie. Et, merci Seigneur (j’ai failli mettre Merlin), elle jouait parfaitement bien la comédie. Alors, pour cette journée uniquement, elle était Partisane. Et ne dirait rien à Tobias ou Edelweiss… sinon, elle est bonne pour la casse.
Nobody tendit la main droite avec un demi-sourire. Il fallait bien que quelqu’un fasse le premier pas.

- Eh bien. Je suis N… Kayla Torres. Enchantée de t’avoir bousculé.

Les yeux de la jeune femme brillaient d’amusement. Elle avait néanmoins failli commettre la pire erreur de sa -pour l’instant- courte vie. Nobody Rowena Chacon était bien trop connue des Partisans. Alors si aujourd’hui elle était une autre… Et Kayla, qui était son prénom premier, et inconnu de tous excepté de sa sœur aînée et de son [bip] de frère, avait été le premier à sortir. Comment aurait-elle pu s’appeler sinon? Elle savait mentir, mais enchaîner comme cela, peut-être pas. Donc c’était aussi bien d’avoir lancé son prénom d’origine.

Et puis mentir… qu’est-ce que cela pouvait faire? Ce garçon, elle le verrait sans doute pour les quelques minutes qui suivraient, allez, s’il y avait le feeling, pour l’heure. Ils discuteraient, échangeraient des banalités, puis il s’en irait vu qu’il semblait si pressé. Et elle irait acheter des lunettes de soleil, et un bon livre de science fiction. De préférence un écrit avant l’arrivée des Pouvoirs. C’étaient les meilleurs.
En bref, elle ne reverrait jamais son interlocuteur, et ce ne serait pas si mal. Elle pouvait passer quelques minutes sympathiques, et puis elle disparaissait dans la nature. Qui sait, la prochaine fois qu’elle sortirait, elle aurait sans doute les cheveux verts? Juste pour l’incognito bien sûr.

Léandre décida qu'il était temps d'arrêter de se dandiner bêtement sur ses jambes et qu'il allait devoir partir. La fille le prit de court en faisant ce qu'il n'avait pas osé faire il y a deux minutes: lui tendre la main.

Kayla Torres ? Personne de ce nom sur la liste des Partisans. Léandre étouffa un soupir. Bien sûr ca ne voulait rien dire parce que toute personne sensée défiant un gouvernement changeait de nom, mais c'était déjà un petit plus. Léandre lui, n'eut aucun mal à trouver un nom. Tous les habitants de la Tour avaient un nom d'emprunt qui leur servait sur les passeports ou autres formalités administratives lorsqu'ils devaient voyager. Léandre Prince s'appelait Lin Wagner, c'était tout simple... bien sûr, en rentrant, il allait devoir demander un autre nom mais ce n'était que de la paperasse, et officielement, il pouvait changer quand il voulait, à condition d'avoir déjà en tête un nouveau nom. Avec un faible sourire, il tendit la main et serra celle fine et minuscule au mileiu de ses longs doigts de Kayla:

Lin Wagner, enchanté aussi. Tu... on marche un peu ?

Ce n'était pas que Léandre avait envie de rester planter au milieu du trottoir en ayant l'air profondément stupide mais... très peu pour lui du moins. D'un geste calculé pour ne rien montrer de la paume de sa main, il remonta ses lunettes qui glissaient sur son nez dans l'arète était bien trop droite. pourquoi ne pas avoir un nez en trompette, c'était bien mieux, bien plus pratique pour porter des lunettes pardi !

Une étrange émotion empoigna le coeur de l'assassin. Si quelqu'un l'apercevait, ici, maintenant, en train de parler avec une fille inconnue, il risquait gros. Et elle mourrait dans les cachots de la Tour, décapitée, brûlée vive ou glacée. Les talents meurtriers de manquaient pas dans les sous-sols... Léandre (j'ai encore failli marquer Nathan... tsss) regarda prudemment à droite et à gauche derrière ses lunettes. Rien de suspect. Mais il préféra rester sur ses gardes, prêt à bifurquer et laisser plantée Kayla. De toutemanière, s'il la blessait... ce n'était pas comme si elle allait lui en vouloir. Après tout, il n'allait plus la revoir... mais bon, il ressentira surement de la culpabilité...

Marcher? Nobody hésita un bref instant. Elle venait de se rappeler que Tobias était de sorti, aujourd’hui… voilà sans doute la raison de sa présence au moment où elle quittait les souterrains. Il devait partir chercher de la nourriture, principalement, chez un fournisseur rebelle qui se faisait passer pour partisan. Et qui, d’après les souvenirs de la jeune femme, n’habitait pas loin d’ici… ce serait telleeemment dommage de le croiser… en compagnie de quelqu’un qui n’était sûrement pas un rebelle. Mais allons bon. Elle trouverait bien une excuse sur place… n’est-ce pas?

- Pourquoi pas.

Elle avait lancé cette phrase avec un léger haussement d’épaules et un sourire. En réalité, elle ne jouait pas réellement la comédie. Elle agirait comme cela avec n’importe qui, et que ce Lin soit un Partisan ou pas, elle agissait ainsi. Mais il fallait vite réfléchir à des questions potentielles qu’il pourrait poser, les questions d’usage quoi… genre le numéro de la rue où elle était censée habiter, le nom de ladite rue, et une ville qui ne soit pas Los Angeles. Elle avait bien fait de bien écouter ses cours de survie, elle… elle se rappela une adresse que quelqu’un avait un jour lancé au hasard, qui était en réalité celle d’un restaurant. Elle mémorisa. Avant de poser elle-même la question, tandis qu’ils marchaient le long de la rue surpeuplée:

- Alors… tu habites dans le coin?

La Tour de Dorian lançait une ombre malfaisante et glacée que le passage. Nob’ mourait d’envie de changer de trottoir pour aller au soleil, mais cela serait trop trahir son malaise. Malgré la chaleur ambiante, elle avait la chair de poule. Chacon reporta son attention sur son interlocuteur, tournant légèrement la tête pour l’avoir lui et le trottoir dans son champ de vision. Qu’elle ne se casse pas la figure encore une fois en heurtant encore quelqu’un d’autre… et si c’était une nouvelle fois un beau gosse, elle n’aurait que l’embarras du choix… bref, c’est beau de rêver.

Léandre, bien caché derrière ses lunettes, acquiesca brièvement, pour montrer sa satisfaction ? Contentement ? Il ne savait pas vraiment pourquoi mais le principal était qu'ils bougeaient. Hors, une cible mouvante est beaucoup plus difficile à repérer et suivre qu'une cible fixe,extrèmement visible dans une foule en déplacement. Léandre prit bien soin de masquer sa démarche habituelle pour brouiller les pistes. On est prudent ou on ne l'est pas, lui répététont souvent. D'un mouvement d'épaule Léandre réinstalla confortablement son sac sur son dos. Le moindre de ses gestes était calculé pour ne ressembler en rien à ce qu'il faisait en réalité, il s'inventait un personnage, Lin, pour évoluer plus facilement. Bien sûr, il mentait à Kayla, mais ce n'était rien compraré au plaisir qu'il ressentait, à l'air libre.

Kayla, elle semblait réflechir. Soudain, après un léger silence, elle lui demanda ou il habitait. Curieuse question. Etait ce comme ca que des jeunes commençaient une discussion ? Léandre n'avait jamais réellement abordé quelqu'un dans la rue et n'avait jamais discuté avec quelqu'un qu'il ne connaissait pas. La jeune fille semblait tout à fait à l'aise. Avec un rictus aux lèvre semblable à un tic, Léandre répondit avec assurance:

Non, je suis en voyage. J'habite en Europe, tu ne dois pas connaître. La ville je veux dire.

Rien n'était plus simple que de mentir. Léandre était billingue français anglais, et il avait de très, mais alors très, vagues souvenirs du Norvégien. Tous les ans ses instructeurs le poussaient à réapprendre sa langue maternelle mais il refusait. Pourquoi apprendre quelque chose qui le ramenait dans un passé presque oublié, alors que ses parents, tués d'après les dossiers, par des Rebelles, étaient encore en vie ? Inutile, fastidieux et bien trop inconnu. Point.

Le jeune Prince réfléchit quelques secondes. Se faisait il de demander la même chose ? Sûrement. Pourquoi n'avait il pas eu des cours de "sociabilités" ? Ce serait très bien rentré dans son emploi du temps entre les cours de "Diplomatie" et "Anatomie". Léandre se dit qu'il devait retenir l'idée, prometteuse et untile, elle. Il se rappela alors que Kayla attendait peut être sa question.

Et toi ? Tu es du coin ?

Nobody esquissa une grimace. Évidemment qu’elle ne connaîtrait pas s’il ne le lui disait pas, mais elle respecta son choix avec un hochement de tête. L’Europe, c’est vaste… et en guerre. Comme le reste du monde. D’après certaines personnes, l’Océanie serait le seul continent non touché par le désastre… et il y aurait peu de gens habitant là-bas, de toute manière. Tobias avait bien envisagé d’aller là-bas, mais il ne pouvait décemment pas faire déplacer un millier de personnes pour un simple espoir. Il y avait d’autres espoirs. Que tous les Rebelles rejoignent le Peuple Caché, et qu’ensemble, ils se soulèvent enfin à l’assaut de la Tour. Qu’ils tuent McFersen. Et que la vie reprenne plus ou moins son cours, son cours d’avant…
Plongée dans ses pensées, Chacon en fut tirée par la voix de Lin qui la rappelait à la réalité. Elle le regarda un instant avant de répondre:

- Plus ou moins. Je suis de Santa Barbara. Je viens pour voir l’Université…

Encore une fois, l’injustice faisait rage. Il n’y avait désormais plus que quatre Universités dans le monde… une à Londres, une à Rome, une à Los Angeles et une dernière à Pékin. Alors qu’avant il y en avait des centaines, et certaines très réputées, désormais, seuls ceux qui avaient beaucoup d’argent et qui étaient évidemment Partisans pouvaient entrer dans une Université. Et encore, c’était très demandé. Ainsi, par une simple phrase, Nob’ se donnait une situation financière plutôt aisée. C’était l’excuse que tous les rebelles entre dix-huit et vingt-cinq ans donnaient. On ne s’attaquait que rarement à des Partisans riches, sauf si on voulait terminer avec la tête à huit kilomètres du corps.
Nobody allait ouvrir la bouche pour poser une question, mais une voix hurla soudain: « Résistants! » et elle se tourna par automatisme vers la personne qui avait crié. Sauf que la rue était désormais en pleine débandade.

- Il ne manquait plus que ça!

Ce n’était forcément pas elle que l’on désignait. Son visage était encore inconnu des services de McFersen. Nikky Riley la connaissait, mais Nobody se doutait que la reine des glaces ne la voulait que pour elle toute seule, elle n’irait pas faire un portrait robot de son visage.
Il y eut soudain des coups de feu, et la jeune femme se tendit. Elle ne savait pas quoi faire dans ces cas-là vis-à-vis de Lin. Elle le regarda d’un air plus ou moins anxieux, comme la personne pour laquelle elle se faisait passer: une femme faible qui avait besoin d’un avis pour réagir.

[bon, sorry, mais fallait faire bouger les choses lol !]

Léandre eut un bref mouvement d'arrêt lorsque Kayla, en trois mots, annonça la couleur: riche, Partisane, fille de Partisans. Et accessoirement élève remarquable. Si elle parlait d'un Lin Wagner à ses parents, si elle citait ne serait-ce qu'une de ses caractéristiques, il était cuit, définitivement cuit. Léandre masqua son trouble en faisant tomber devant ses yeux ses cheveux noirs et en remontant pour la deuxième fois ses lunettes de soleil. La précaution fut cependant inutile car quelqu'un cria "Résistant" quelque part dans la foule, attirant l'attention de Kayla. La foule se mit alors en mouvement, panique et confusion étant ses maître-mots.

L' Agent s'immobilisa. Il n'avait pas le devoir d'intervenir, tant mieux songea-t-il, mais dès que quelqu'un dénonçait un rebelle, les meilleurs agents des Partisans étaient de suite envoyés sur le terrain. Et Léandre allait être découvert.

Affolé, il regarda la jeune fille qui restait immobile, surement terrifiée. Son esprit analysa la situation en un rien de temps. Il préféra faire comme tout le monde: fuir. Des coups de feu retentirent loin de là et il y eut des hurlements. Paul Aflor. Partisan doué d'une précision hors-pair car possesseur d'un don de vision. Une connaissance de Léandre. Ce dernier agit immédiatement. Il empoigna le bras de Kayla qu'il tira violemment avant de lui crier:

Bouges toi, tu veux te faire tuer ?

D'un pas souple, il commença à courir, poussant sans ménagement les personnes qui se trouvaient sur son chemin, jouant pour cela des épaules. Léandre était conscient que son attitude était étrange mais il ne s'en préoccuppa pas. La vue de perçante de Paul l'aurait identifié en un rien de temps, puisque le Partisan possédait aussi une excellente mémoire. Heureusement que lorsque de son apprentissage, il avait du apprendre les plans des plus grandes villes, pour s'y repérer de nuit. Léandre tourna sans aucun doute dans une ruelle et déboucha dans un parc non loin de la Tour. Reprenant son souffle en peu de temps, vive l'endurance, il se tourna vers Kayla:

Désolé si je t'ai fait mal. Tu sais comment se passent les...

Léandre avait failli dire interpellations, vocabulaire propre aux Partisans, alors que les rebelles parlaient d'arrestations.

...les appréhendations. Il vaut mieux ne pas rester sur la place sinon on peut de considérer comme Rebelle... enfin du moins en Europe.

Léandre, derrière ses lunettes, espérait de tout son coeur de marbre, que Kayla ne l'avait pas percé à jour, ou n'avait pas cru le percer. Car si un Partisan réagissait rarement aussi brutalement, il n'en était pas de même pour les Rebelles, ces lâches cloportes perturbateurs de l'ordre publique sagement instauré par Dorian, qui fuyaient sans demander leur reste; abandonnant par la même occasion leur compagnon.

Nobody ouvrit de grands yeux. Ce n’était pas de la peur que l’on pouvait lire dans son regard, mais une tristesse infinie. Avant que Lin ne l’empoigne en hurlant des mots qu’elle ne comprit pas, elle vit une balle se loger dans la tête du Rebelle. Leurs regards se croisèrent avant que celui de Paul ne devienne vitreux, puis mort. Nob avait cru y déceler une lueur d’urgence. Pourquoi une lueur d’urgence? Mais elle avait détalé, à la suite de Lin, se composant un masque d’innocente terrifiée. Elle venait de voir un ami se faire tuer, et elle devait jouer les écervelées. C’était bien trop pour elle.
Lorsque le jeune homme s’arrêta de courir, elle suivit machinalement le mouvement, et s’arrêta totalement. Son souffle était court, son cœur battait la chamade à cause de la course. La rage et l’adrénaline affluaient dans son sang, et finalement, elle se retourna violemment contre le mur et y balança son poing. Mais elle avait mal calculé son instinct de conservation. Son bras devint totalement invisible, et sa main passa à travers les briques. Rageuse, elle ressortit du mur et plia et replia ses doigts une fois que sa main eut réapparue.

Son attitude n’avait plus du tout l’air de la petite fille sage qu’elle se donnait quelques instants plus tôt. Son regard bleu lançait des éclairs et s’assombrissait sous l’effet de la colère. Elle retrouva vite son calme, mais il fallait maintenant une excuse pour ce brusque accès de fureur. Elle s’exclama, reprenant sa comédie parfaite:

- Ils sont sans gênes, en pleine rue! Devant la Tour, qui plus est…

Son cœur était serré. Combien de morts y aurait-il encore pour satisfaire la soif de pouvoir d’un homme? Ses parents y avaient succombé, son frère avait cédé à la tentation… à quand le tour de sa sœur? Son tour à elle? Celui de Tobias?
Nobody inspira profondément. À ce moment, en effet, elle se sentait plus proche de Kayla, l’enfant qu’elle avait été, plutôt que de la farouche Nob’. Et cette sensation était pour le moins troublante. Elle grommela à l’adresse de Lin:

- Et ici, c’est l’inverse qui se produit. Si tu coures, on te tire dessus.

La jeune femme plissa les yeux. Le régime était le même partout, Europe ou pas Europe. C’était d’ici, au cœur de Los Angeles, d’où venait les ordres. Alors c’était forcément pareil partout. Nobody perdit son sourire de façade.

- Tu mens.

Une simple affirmation. Détendue, Nob’ s’appuya contre le mur. En réalité, elle préférait quand il n’y avait pas de faux semblants.

Léandre vit avec étonnement Kayla ceder à un excès de fureur. Ses yeux s'agrandir derrière ses lunettes teintées en voyant le bras de la jeune fille tranverser, invisible ou immatériel, le mur de brique. Un fin sourire se dessina sur les lèvres de l' Agent. Ils étaient à égalité, ou du moins, lui connaissait le pouvoir de Kayla, elle connaissait une partie du sien. Une infime partie.

Parfait. De plus il savait à présent qu'elle avait plus de dix neuf ans, malgré sa petite taille Deuxième information. Le sourire de Léandre se figea, pour disparaître totalement quelques secondes plus tard lorsque, impassible, elle affirma qu'il mentait. Soit. Il n'avait pas été très fin sur le coup... mais tout le monde courrait et Léandre pensait bien faire en affirmant cela. Après tout, il n'avait jamais assisté à une interpellation armée. Kayla s'appuya nonchalement sur le mur, le dévisageant. Elle attendait une réponse.

Léandre n'était pas tranquille. Une Partisane ne pouvait voir dans ce qu'il avait fait qu'une marque de crainte, peur, et surement, de panique. Or, qui pouvait craindre une arrestation ? Qui pouvait juger utile de s'enfuir lorsque un Rebelle était dénoncé ? Un Résistant.

Tout son contraire. La conclusion laissa un goût amer dans la bouche de Léandre qui se mordit la lèvre. Maudit réflexe. Ses instructeurs lui avaient souvent dit qu'il avait bien trop de tic pour être méconnaissable avec deux trois bricoles pour déguisements. Son corps parlait pour lui, si son visage se taisait. Et ses yeux, bien trop expressif d'après eux. C'était d'ailleurs une des raisons qui l'avaient poussé à porter jour et nuit des lunettes de soleil. Seulement lorsqu'ilétait concentré, il contrôlé parfaitement le moindre de ses mouvements, et même son rythme cardiaque. Mais Léandre avait uune autre faiblesse: il était facilement déconcentré par l'extérieur. Aussi à cet instant crucial, son souffle s'accéléra, son coeur bondit dans sa poitrine et Léandre ferma les yeux. Ayant repris contenance, il déclara d'une voix dénuée d'émotion et de sentiments:

Qu'est ce qui te fait dire ca ? Tu es déjà allée en Europe ? Dans les tréfonds des forêt nordiques ?

De maigres souvenirs de sa vie d'avant lui revinrent en mémoire. Le rire de sa mère, unique souvenir qu'il avait d'elle, rire cristallin qui résonnait lorsqu'il neigeait, la voix grave de son père qui n'était que association de sons grutturaux, et qui avait une signification pour les animaux. Les forêts nordiques étaient un très mauvais exemple. QUi étaient les Rebelles pour tuer des gens aussi gentils, inoffensifs que ses parents ? Des monstres tout simplement, capable de briser la vie d'un enfant. Léandre serra les poings. Heureusement que Dorian prennait soin des orphelins comme lui, lui offrant un foyer, une éducation sans pareille, un avenir. C'était pour ca que Léandre mettait son don au service des Partisans. Tuer des Rebelles, c'était tuer des assassins potentiels. Et tant pis s'il vendait son âme au diable, tant pis s'il perdait la vie, il aura au moins emmené des dizaines et des dizaines de Rebelles avec lui.

Les souvenirs affluants, Léandre sentit avec honte, une larme perler au coin de ses yeux. Jurant grossièrement, il murmura un ambigu:

Je les hais tous...

Espérant que Kayla ne l'entendrait pas. Il se reprit néanmoins:

ALors ? Tu es déjà sortie de Los Angeles ? Si ce que tu dis est vrai, alors tous les gens qui étaient autour de nous n'étaient que des Reb... Résistants.

Nobody eut un léger sourire, et elle rabaissa machinalement sa casquette, qui couvrit entièrement son front, s’arrêtant à la lisière des sourcils. Elle avait des cheveux devant les yeux, masquant leur pétillement amusé. Sa colère précédente étaient enfouie sous une tonne de self-control. Les agissements des Rebelles étaient loin d’être ceux des Partisans. Ceux qui fuyaient étaient soient des Résistants, soient des Partisans passifs. Et au vu de la carrure de Lin, il n’était pas passif. Avec un physique et une endurance pareil, on s’entraînait souvent. Et elle ne l’avait jamais vu dans les souterrains de Los Angeles. Et les Résistants qui arrivaient du monde entier venaient d’abord voir le peuple Caché avant de risquer une balade en plein air.

- Les ordres viennent de la Tour, pour les Partisans. Et pour les Résistants, ils viennent également du continent américain.

Le continent américain, c’est vaste. Dorian savait déjà que le peuple Caché était sur son territoire. Nob’ ne dévoilait pas une information classée confidentielle. Elle gérait parfaitement ses paroles.

- Les Rebelles agissent de la même manière. Soit ils fuient lors d’une exécution publique dans ce genre, soit ils restent et aident au mieux. Conclusion, il n’y avait pas de rebelles dans la rue aujourd’hui. Et, ce n’est qu’une supposition, chaque être humain agit de la même manière, qu’il soit américain ou européen.

Nobody fit un sourire. La tête de Paul, traversée d’une balle, lui revint en mémoire aussitôt, et ses mâchoires se crispèrent.

- Ce que je me demande, c’est pourquoi un Partisan actif aurait fui devant ses congénères.

Nob’ n’avait pas un esprit de déduction aussi fin que celui de sa sœur. Elle lançait ses affirmations un peu au hasard, quêtant une réaction de l’autre côté. Et si elle se trompait, elle commettait une grave erreur, dans les deux cas de toute manière. Elle se désignait avec fierté comme Résistante. Mais son calme lui permettrait de disparaître, littéralement, dès qu’elle le voudrait. Son pouvoir, espérait-elle, ne lui ferait pas faux bond. Pas aujourd’hui… elle se fondrait dans les murs, avant de rejoindre la base et d’annoncer la mauvaise nouvelle à la femme de Paul.

- Cet homme était marié et allait avoir un enfant.

Cette fois, le ton de la jeune femme était dégoûté. Les Rebelles ne tuaient jamais comme cela. Ils se défendaient. Pour l’instant, et depuis trente ans, ils ne faisaient que se défendre contre l’envahisseur. Les quelques coups d’éclats qu’ils avaient produits étaient épars. Lorsqu’ils croisaient un Partisan, ils le tuaient, c’était logique… car le Partisan allait forcément frapper lui aussi… et c’était à celui qui était le plus rapide. Mais aujourd’hui, Nobody ne voulait pas jouer sur la rapidité. Elle ne désirait pas causer une mort en plus… ou mourir elle-même. Elle se glisserait entre les murs et rejoindrait Tobias. Pour l’instant, aucun des deux protagonistes, que ce soit Lin ou Nob’ ne montraient de signes d’agressivité. Peut-être n’y aurait-il pas d’affrontement entre les deux aujourd’hui.

Léandre se figea. Avait il été si... Comment pouvait elle savoir ce qu'il était. Une explication possible était qu'elle lui ait menti. Certes, c'était plus que probable. Donc elle était une Rebelle, elle en était fière, et elle ne le cachait pas.

En revanche, ce qu'elle cachait, c'était ses yeux et l'expression de son visage, ce qui gêna Léandr eau plus haut point. Par quelques coups d'oeil, il repréra le terrain, prêt à tomber dans une embuscade Rebelle. Il n'avait pas, contrairement à elle, affirmé qu'il était dévoué à un clan. Tant mieux, il avait un coup d'avance. Se préparant à être attaqué, bien qu'il ne voyait pas comme être invisible pouvait être offensif, il crispa sa main et, sentant la douleur désormais familière, il entreprit d'agrandir la lamre d'argent qui vivait dans la paume de ses mains; Il n'avait qu'à préparer une main, c'était amplement suffisant.

Léandre se passa une main dans les cheveux. Que devait il répondre. Un homme marié ? Bientôt père ? Et alors, son fils, ou sa fille n'aura jamais à entendre ni voir son père mourire devant ses yeux, ou sa mère tenter de le protéger. Vainement.

Léandre recula, pour laisser un espace suffisant entre Kayla, ou quelque soit son nom, et lui. Sentant le mur de brique de l'autre côté de la fine ruelle dans son dos, il s'y appuya et fixa la Rebelle. Le visage de marbre tendu par la concentration, il se décida à répondre.

Marié ? Père ? Il est mort comme il le méritait, en combattant. Un Rebelle aurait fui, comme je l'ai fait, toi même tu l'as dit. Toutes les personnes qu'il y avait ont fui, difficile de dire le bord de chacunes dans la confusion. Pourquoi émets tu des jugements hatifs ?

Léandre avait choisi de continuer le jeu. Pour en apprendre le plus possible sur cette Kayla et, si elle s'échappait, pouvoir ramener de précieuses informations à son sujet à la Tour, qu'il allait rejoindre une fois cette discussion achevée. Tout Partisan qui ramenait des inforamtions fiables et intéressantes était sur de monter en grade et de voir s'octroyer une mission très vite. Un vibrement tira Léandre de ses pensées. Le garçon hésita à sortir son portable, denrée rare et précieuse face à Kayla. Mais si c'était pour l'appeler en vitesse... il ne devait pas tarder. Sa main se glissa furtivement dans sa poche pour calmer le portable. Le vibrement s'intensifia pour s'arrêta. Léandre sortit sa main et s'immobilisa, avisant l' attitude tendue de Kayla.

Alors ?

Il lui fallait alimenter la discussion pour qu'elle ne puisse réfléchir à autre chose que des réponses. Lui, attendait un nouvel appel qui indiquerait une urgence. En attendant une réponse, Léandre fit ce qu'on lui avait appris: il repéra les sorties possibles, les distances, sans tourner la tête. Ses lunettes cachaient le mouvement de ses yeux mais pas ceux du corps.

Mort comme il le méritait. Les mots résonnèrent dans l’esprit de Nobody avec la force de sa hargne. On ne mérite pas de mourir. Personne ne mérite la mort. Même pas McFersen. La mort était trop surfaite, la mort rendait laid. Personne ne devrait mériter de mourir. Chaque cicatrices que la jeune femme portait avec la fierté de celle qui a combattu et qui en a réchappé est un souvenir. Les souvenirs sont bons, mais la mort est mauvaise. Certains méritent de souffrir. Mais personne ne mérite de mourir. Les pieds de Nob’ se décolorèrent lentement, et devinrent progressivement invisible, avant que cela ne se propage dans le reste de son corps. Elle esquissa un dernier sourire, marqué de son espièglerie habituelle.

- Nobody Chacon. Rappelle-t-en, on se reverra sûrement. Lin.

Le nom qu’elle lança sonnait comme une insulte. Nob’ devint invisible totalement avant de se fondre dans le mur derrière elle. Peut-être s’était-elle trompée. Mais son instinct lui dictait que non. Seul un Partisan pouvait penser que l’on méritait la mort. Un Partisan en colère, qui plus est, pas seulement un de ces idiots avec des mitraillettes et des pouvoirs incontrôlables. Ceux-là n’existaient que pour le pouvoir et le plaisir de faire souffrir. Mais ceux qui étaient en colère… ils n’avaient plus rien à perdre car déjà tout perdu.
*Je devrais faire psychologue pour cinglés*, songea Noob en s’enfonçant dans les recoins de Los Angeles.
Totalement invisible, et se réjouissant dans sa tristesse que son pouvoir réponde aussi bien lors d’émotions extrêmes, la rebelle rejoignit lentement le peuple caché. Il fallait bien annoncer à la femme de Paul ce qu’il s’était passé. Nobody serait là pour elle. En espérant qu’elle ne fasse pas de bêtises… comme aller attaquer la Tour avec son maigre pouvoir de régénération cellulaire.

Les pensées de la jeune femme se retournèrent vaguement vers « Lin ». Froid, distant, il se contrôlait trop bien pour être un piéton comme les autres, et c’en était inquiétant. Tous les Partisans avaient-ils ce détachement? Comme une soif de mort.

[désolée du temps de réponse lol ! P’tit manque d’inspi]

Nobody Chacon. Rappelle-t-en, on se reverra sûrement. Lin.
Nobody Chacon. Rappelle-t-en, on se reverra sûrement. Lin.

La phrase tournait en boucle dans l'esprit calme et pourtant si brouillon de Léandre. Nobody Chacon. Etait-ce une blague ? Le nom de Chacon était connu à la Tour pour être associé immédiatement à une supérieur des Résistants. L'information avait couté de nombreuses vies aux Partisans, mais ils ne le regrettaient pas. Chacon. Se pouvait il qu'il vienne de rencontrer une des têtes des Résistants et qu'il n'ait rien fait pour l'empêcher de partir ? Léandre plissa les yeux, formant une barre soucieuse sur son front. Non, ca ne devait pas être elle. Elle était bien trop jeune.

EN tant que minuscule insecte dans la hiérarchie des Partisans, Léandre n'avait pas accès à toutes les informations quant aux Résistants. Juste le minimum, mais c'était bien suffisant. Toutefois, il savait que Chacon était beaucoup plus âgée que lui, et qu'elle maîtrisait l'électricité, gros désavantage pour lui dont le sang charriait un métal des plus purs... et des plus conducteurs. Heureusement qu'aucun adulte au pouvoir de maîtriser les métaux n'existait...

Ainsi Nobody Chacon était peut être la soeur d'une des Résistantes les plus actives. Un sourire malsain s'étira sur les lèvres de Léandre qui, oubliant la sympathie première qu'il avait ressentie pour Kayla, ou plutôt Nobody, ne vit que les avantages que pourrait lui rapporter ces informations. Il connaissait son pouvoir, sa taille, la couleur de ses cheveux et de sa peau. Parfait. D'un geste calculé, il remonta ses lunettes de soleil et ressorti de la ruelle. Après avoir tourné deux trois minutes dans les rues qui cerclaient la Tour, il trouva un passage. IL déclina son nom d'Agent, connu uniquement dans l'enceinte de la Tour et entra rapidement.

Avec un air hautain, une démarche chaloupée et aristocratique, il avança sous les regards de ses camarades vers un bureau que tous revaient d'approcher. En noir, sur la porte, était écrit sobrement: BUREAU D'INFORMATIONS.

Léandre poussa la porte et enlevant ses lunettes, déclara d'une voix de laquelle perçait une profonde satsifaction:

Signalisation d'une Résistante, sûre à 80%.

La secrétaire releva la tête rapidement. Froide et étonnée, elle demanda:

Mission ? Hasard ? Recherche ? Airain, tu n'étais pas sensé rencontrer des Résistants.

Hasard. Ma couverture de Lin Wagner est cuite, mais les informations sont intéressantes.

La secrétaire pianota un instant sur son clavier. Les lèvres pincées, elle le regarda, lui signalant ainsi de constituer la fiche.

Nobody Chacon. 19ans et quelquesmois. Petite...

[pas grave... on organise une autre rencontre ? J'ai envie d'envoyer Léandre en mission...]